Le crâne d’ours des cavernes

Crâne d’ours (Ursus deningeri) provenant de la Grotte préhistorique d’Azé.

Ce crâne est particulièrement bien conservé, grâce aux concrétions calcaire qui ont soudé la mandibule à la mâchoire supérieure. Ces mensurations permettent de le rapporter à l’espèce Ursus deningeri, l’ancêtre de l’ours des cavernes.

Il a été découvert lors des fouilles menées dans la Balme de Rizerolles ou Grotte préhistorique d’Azé, à la fin des années 1980 par les paléontologues Alain et Jacqueline Argant. Ces grottes forment un exceptionnel gisement archéologique et paléontologique, qui a notamment livré des restes d’ours et de lions du Quaternaire ainsi que des traces de la plus ancienne occupation humaine en Bourgogne du Sud. L’exploration spéléologique du réseau est toujours en cours : une nouvelle salle a été découverte au début de l’année 2020, après plusieurs décennies de dégagement des sédiments. La visite de deux grottes est possible sur site, à partir du 1er juillet, sur réservation (http://www.grottes-aze71.fr/).

Sur ce site, on peut suivre l’évolution d’Ursus deningeri, un ours de la taille de l’ours brun actuel, vers l’ours des cavernes, Ursus spelaeus, beaucoup plus grand : 1,40 m au garrot, plus de 3 m de haut, dressé sur ces pattes arrières. Descendant comme l’ours brun d’Ursus etruscus, les Ursus deningeri ont connu une évolution séparée des autres espèces d’ours, dans l’isolat formé par l’Europe, fermée par d’imposants glaciers au cours des deux dernières glaciations. Ces processus évolutif ont abouti à la forme Ursus spelaeus, apparue il y a environ 160 000  ans. Mais l’ours brun a pourtant coexisté avec l’ours des cavernes. Pouvait-il se croiser avec les ours des cavernes ou leurs ancêtres, comme les actuels ours polaires et grizzlis ? C’est une question auxquelles les études génétiques apporteront des réponses.

Reste d’ours et autres carnivores dans la Grotte préhistorique d’Azé © Serge Caillaud, Spéléomagazine n°695

L’abondance des fossiles dans la grotte s’explique par la mort d’un individu de temps en temps pour des raisons naturelles : réserves de graisse insuffisantes pour passer l’hiver rude, maladie, mortalité lors des naissances pour les femelles, vieillesse, causes accidentelles : prédateurs, crues subites de la rivière souterraine… Le décès d’un ours tous les vingt ans pendant mille ans produira une cinquantaine de squelettes. Imaginez l’accumulation sur des centaines de milliers d’années !

Le paléontologue Alain Argant dans la Rotonde de la Grotte préhistorique d’Azé lors des recherches à la fin des années 1980 © Alain Argant  à (la photo du monsieur, Alain Argant, devant un squelette d’ours)

Les conditions favorables du monde souterrain, naturellement conservatoire, expliquent la bonne conservation des ossements fossiles. La sédimentation rapide lors de crues atteignant des galeries habitées par les ours recouvre rapidement et protège les ossements, mais  le plus souvent le courant d’eau les disperse, les  transportant sur des distances plus ou moins importantes, expliquant le mauvais état des vestiges.