Le fruit d’une évolution naturelle et humaine

L’omniprésence de l’homme, indissociable de l’histoire du Grand Site, en fait une entité profondément vivante. Si l’homme préhistorique a laissé peu de marques dans le paysage, les époques contemporaines l’ont plus profondément façonné. Au-delà de constructions ou des plantations de vigne, les pelouses calcaires, présentes aux sommets des Roches, en sont également le témoin.

 

Un milieu spécifique

À l’origine couvertes d’un milieu forestier, les parties sommitales des Roches de Solutré et de Vergisson (ainsi que celles du Mont de Pouilly, et hors du périmètre du Grand Site du Monsard et du Bois de Fée – Mont de Leynes) ont été défrichées par l’homme. Jusqu’au milieu du 19e siècle, l’élevage représente encore un complément de revenu nécessaire aux agriculteurs. La polyculture est commune dans les exploitations, et ce sont les femmes et les enfants qui emmènent les animaux pâturer sur les pelouses des Roches. Le pâturage et les brûlages réguliers entretiennent les milieux. On parle à l’époque de prairies d’embouche, la végétation y étant tellement riche sur le plan nutritif qu’elle permettait d’engraisser les animaux (les plantes se sont adaptées à un sol très pauvre et très sec en été, en constituant dans leurs feuilles et tiges d’importantes réserves).

Elles abritent aujourd’hui un milieu spécifique : les pelouses calcicoles (ou pelouses calcaires). Ces espaces sont de vastes étendues de pelouses rases, aussi appelées teppes, qui recouvrent un sol pauvre et peu profond.
On retrouve en continu cette même formation végétale sur le dos des roches et des monts du mâconnais, du sud au nord.

 

Une richesse en danger

roche de solutré

Depuis les années 1950, la monoculture a pris le pas sur la polyculture. L’exploitation exclusive de la vigne a permis de faire vivre les familles sans autres activités annexes, les femmes et les enfants délaissant ainsi les zones peu productives et difficiles à exploiter. Les pelouses calcaires ont été laissées à l’abandon, offrant à la nature l’occasion de reprendre ses droits : sur les pelouses, le long des chemins, se sont installés des genêts, des chênes pubescents, mais surtout de nombreux bosquets de buis. Ce dernier, très difficile à éradiquer, présente, en outre, le risque, par ses réseaux de racines, de faire éclater les roches et d’accélérer ainsi leur érosion.

 

Cette fermeture des milieux, première étape vers la restauration de la forêt originelle est une évolution naturelle, climacique. Mais elle est désastreuse pour le paysage, et pour la diversité biologique qu’accueillent les pelouses calcaires.

Mais d’autres menaces pèsent également sur ce milieu si riche et si fragile : l’enrésinement, fréquent dans les années 80, finit par s’étendre si on ne le contrôle pas régulièrement ; le développement d’espèces envahissantes venu des remblais et des jardins (Robinier faux acacias, sumac) ; le piétinement des visiteurs venus pour la notoriété des sites ; la pratique de véhicules tout terrain.

 

Une richesse remarquable

 

Les pelouses calcaires constituent un milieu propice à une multitude d’espèces. Un grand nombre de conditions sont réunies pour que des espèces végétales et animales remarquables et rares y prolifèrent : exposition, ouverture, microclimat, altitude… autant de facteurs qui expliquent leur présence.

 

Le climat et la géologie

 

Situé juste au-dessous de la zone de rupture climatique entre le nord et le sud, le mâconnais est soumis à un climat continental teinté d’influences méditerranéennes atténuées, de quelques influences atlantiques et de quelques influences montagnardes.
Ces phénomènes météorologiques, la coexistence de sols cristallins, calcaires et argilo – calcaires (la rapide disparition des eaux de pluie dans les nombreuses fissures rend le sol sec et aride), ainsi que l’altitude des reliefs et leurs expositions, sont autant de facteurs qui contribuent à la richesse du milieu, auxquels il ne faut pas oublier d’allier l’intervention de l’homme qui, au fil des temps a profondément modifié le paysage et les milieux originels.

 

La flore

« l’Inule des montagnes », « la Coronille arbrisseau », « le Micrope droit » et une multitude d’orchidées sauvages… Mais le plus intéressant, ce sont les associations végétales. En effet, sur ces minuscules pastilles de verdures, des espèces inféodées aux milieux montagnard, méditerranéen ou océanique cohabitent.
Fétuque, carex, Brôme dressé, Hélianthème blanc, Silène d’Italie (le plus exceptionnel si haut). Dans les éboulis : Œillet des montagnes, Seslérie bleue, sédums, saxifrages (association méditerranéenne et montagnarde).

montage flore

Copyright © Conservatoire des Sites Naturels de Bourgogne

La faune

La faune n’est pas en reste, et la combinaison faciès de falaises et milieux ras offre au Bruant ortolan, aux Hiboux petit et grand-duc, à l’Engoulevent d’Europe et au Faucon pélerin des zones de refuge idéales. L’Alouette lulu, la Pie grièche écorcheur et le Buzard cendré affectionnent les zones herbeuses des prairies. Le Papillon flambé, l’Hespérie des cirses, l’Agreste, la Mante religieuse et le Criquet méditerranéen sont également très courants à Solutré. Sans oublier les nombreux Lézards vertes et Couleuvres vertes et jaunes.

 

 

 

 

 

 

 

 

Des zones reconnues et protégées

La richesse de cette diversité biologique, caractérisée par la présence d’espèces rares et d’associations végétales remarquables, est reconnue au niveau européen : les Roches de Solutré et Vergisson, le Mont de Pouilly, et en dehors du Grand Site, le Monsard (commune de Bussières) et le Bois de Fée (commune de Leynes), ont été proposés au réseau Natura 2000. En concertation avec les acteurs locaux, les objectifs de conservation de ce patrimoine et des mesures de gestion appropriées ont été définis.

La roche de Vergisson fait également l’objet d’un arrêté préfectoral de protection du biotope, en date du 13 juin 1991. Les roches de Solutré, de Vergisson, le Mont de Pouilly (mais aussi, en dehors du périmètre Grand Site le Monsard à Bussières et le Bois de Fée – Mont de Leynes) sont inscrits à l’inventaire des ZNIEFF (Zones Naturelles d’intérêt Écologique, Faunistique et Floristique) de type I, caractérisées par la présence d’espèces rares et d’associations végétales remarquables. Le périmètre de Natura 2000 s’est calqué sur celui des ZNIEFF.

 

 

 

Article rédigé par Stéphanie Beaussier

Gestionnaire du patrimoine naturel et du paysage, et de la Maison de Site 

s.beaussier@saoneetloire71.fr